Le fait de s’alimenter de façon machinale pourrait bien contribuer aux problèmes de poids toujours plus importants à l’échelle de la planète. Les recherches portant sur une alimentation consciente se sont largement concentrées sur le contrôle pondéral et l’apport d’une aide aux gens pour avoir un meilleur rapport avec la nourriture. Mais comment peut-on adopter une alimentation plus raisonnée ?
L’alimentation machinale
Une étude scientifique a conclu que les personnes qui avaient reçu des aliments conditionnés dans des emballages plus grands, de plus grosses portions dans les restaurants, ainsi que des assiettes plus grandes avaient consommé en moyenne 30 % de nourriture en plus à ces occasions, en comparaison avec les personnes qui avaient reçu des portions et tailles plus petites [1]. Cependant, 70 % des personnes interrogées pensaient avoir consommé la même quantité que lors de leurs repas habituels, et 94 % d’entre elles étaient convaincues de ne pas avoir été influencées par la taille du conditionnement, de la portion ou de l’assiette.
Les résultats de cette étude suggèrent que des facteurs externes peuvent nous pousser à trop manger de manière machinale [1].
De même, une récente méta-analyse a montré que manger alors qu’on est distrait, comme en regardant la télévision ou en jouant à un jeu vidéo, entraîne une consommation alimentaire plus importante [2]. Ce phénomène pourrait être dû au fait que la distraction parasite la perception des attributs des aliments, tels que le goût, la texture et l’apparence, ce qui retarde la sensation de satiété qui nous pousse à arrêter de manger. Être distrait pendant les repas peut interférer avec le souvenir d’avoir récemment mangé, ainsi qu’entraîner plus de grignotages [2,3].
En revanche, rediriger l’attention vers la nourriture pendant le repas permet de réduire les grignotages chez les femmes minces [3]. Ce qui suggère que prêter attention à la nourriture que l’on ingère, c.-à-d. une alimentation consciente, participe à la réduction de la surconsommation machinale.
L’alimentation consciente
La conscience représente le fait de prêter volontairement attention au moment présent sans jugement. Elle reflète une ancienne pratique de méditation bouddhiste [4]. L’alimentation consciente signifie simplement le fait de prêter pleinement attention aux repas. Cela comprend : se concentrer sur les attributs sensoriels des aliments, tels que le goût, l’odeur et la texture, reconnaître les réponses reçues en mangeant un repas, telles que les préférences et les aversions, et prêter attention aux signaux de notre organisme, comme les sensations de faim et de satiété [5].
L’alimentation consciente encourage le corps à suivre ses intuitions et à choisir les aliments qui sont à la fois satisfaisants, plaisants et nourrissants.
Du machinal à la conscience
Un nombre croissant d’études s’intéresse à l’impact de la conscience sur une variété de problèmes de santé et relatifs aux modes de vie, y compris les comportements alimentaires nuisibles (par ex., des habitudes alimentaires irrégulières ou l’alimentation émotionnelle) et le contrôle du poids.
Selon une analyse de 21 études d’intervention basées sur la conscience pour changer les habitudes alimentaires liées à l’obésité, 86 % des études montrent une amélioration des comportements alimentaires, de la consommation d’aliments et du poids corporel [6]. Une autre analyse, orientée sur la perte de poids, démontre que six études d’intervention à court terme sur huit ont documenté une perte de poids considérable chez les personnes ayant adopté une alimentation consciente [4].
Il existe également d’autres travaux prometteurs qui suggèrent qu’une alimentation consciente peut aider à prévenir la surconsommation machinale ou par inadvertance chez les personnes présentant un poids corporel sain2,3. L’alimentation consciente s’est également montrée efficace dans l’autorégulation du diabète [7]. Cependant, des études sur le plus long terme sont nécessaires pour vérifier la durabilité des effets. L’on suggère que l’alimentation consciente augmenterait la prise de conscience des sensations de faim et de satiété, mettant fin aux mauvaises habitudes alimentaires et liées au stress, tout en améliorant le contrôle de la consommation d’aliments [6].
D’autres travaux sont nécessaires pour comprendre les mécanismes psychologiques, comportementaux et biologiques derrière ce processus et les interventions à l’efficacité la plus constante [4].
Étant donné que les choix alimentaires sont complexes et peuvent dépasser la conscience, certains scientifiques pensent que la prise de conscience et l’éducation ne sont pas suffisantes pour mettre un terme à l’alimentation machinale [1]. Toutefois, les gens pourraient tirer profit des suggestions suivantes visant à les aider à mieux se nourrir de manière consciente [8,9].
Quelques conseils pour adopter une alimentation consciente [8,9]
Avant d’ouvrir le réfrigérateur ou le placard, prenez une bonne inspiration et posez-vous les questions suivantes : Avez-vous vraiment faim ? Ou soif ? Êtes-vous stressé(e) ? Vous ennuyez-vous ? Prenez un temps pour réfléchir et faire le tri entre vos besoins et vos envies.
Si vous ne ressentez pas le besoin de manger, faites autre chose, comme une balade.
Ne mangez pas sur le pouce, car il est difficile d’être conscient de la quantité de nourriture que vous mangez dans ces conditions. Prenez le temps de vous assoir.
Évitez de manger des aliments directement depuis leur emballage. Prenez une assiette, cela vous permettra de voir et d’apprécier ce que vous mangez, ainsi que la quantité de nourriture ingérée.
Utilisez des plats plus petits, cela vous aidera à contrôler les portions que vous mangez.
Éliminez toute distraction. Éteignez la télévision et tous les appareils à écran, tels que les ordinateurs, téléphones, etc.
Réglez une minuterie, et accordez-vous une vingtaine de minutes pour votre repas.
Mangez en silence pendant cinq minutes, et pensez à tous les éléments impliqués dans la production de votre repas, des rayons du soleil, à l’agriculteur, puis au magasin et enfin au cuisiner.
Essayez de manger avec l’autre main ou des baguettes pour faire durer le repas plus longtemps.
Prenez de petites bouchées et mâchez bien, tout en vous concentrant sur l’odeur, le goût et la texture des aliments. Essayez de mâcher une trentaine de fois à chaque bouchée.
Pensez à poser vos couverts après chaque bouchée. Ne les reprenez pas tant que vous n’avez pas avalé votre bouchée.
Ne vous obligez pas à finir votre assiette. Si vous vous sentez repu(e), conservez vos restes. Au restaurant, demandez à emporter vos restes.
Pour aller plus loin :
1. Wansink B (2010). From mindless eating to mindlessly eating better. Physiology and Behaviour 100:454-463.
2. Robinson E, et al. (2013). Eating attentively: a systematic review and meta-analysis of the effect of food intake memory and awareness on eating. American Journal of Clinical Nutrition 97(4):728-742.
3. Higgs S (2015). Manipulations of attention during eating and their effects on later snack intake. Appetite 92:287-294.
4. Olson KL & Emery CF (2015). Mindfulness and weight loss: A systematic review. Psychosomatic Medicine 77(1):59-67.
5. The Centre for Mindful Eating. Principles of mindful eating. Accessed 02 September 2015.
6. O’Reilly GA, et al. (2014). Mindfulness-based interventions for obesity-related eating behaviours: a literature review. Obesity Reviews 15:453-461.
7. Miller C, et al. (2013). Comparison of a mindful eating intervention to a diabetes self-management intervention among adults with type 2 diabetes: A randomized controlled trial. Health Education Behaviour 41(2):145-154.
8. Harvard Health Publications (2011). Mindful eating.
9. Harvard Health Publications (November, 2015). 10 Tips for Mindful Eating-just in time for the holidays.
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