Peu de données sont encore disponibles concernant l’influence du mode de vie et de l’environnement sur la fertilité féminine et masculine, mais force est de constater le rôle crucial du poids.
La fertilité féminine engagée dès la naissance
Le poids, à n’importe quel moment de la vie, a un impact sur la fertilité naturelle de la femme, rappelle le Dr Isabelle Cédrin-Durnerin*. Ainsi, s’il est petit à la naissance, il diminue la fertilité naturelle ultérieure de la femme. Le poids à l’adolescence et à l’âge adulte a une influence sur l’âge de la première grossesse. Au moment de la conception, surpoids et obésité diminuent la fertilité de la femme et peuvent avoir un effet transgénérationnel. Ceci serait dû à un trouble de l’ovulation, le risque d’infertilité étant très augmenté lorsque l’IMC dépasse 30 kg/m2. Outre le poids, régime alimentaire, activité physique et mode de vie ont également leur importance.
Dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation, le surpoids et l’obésité diminuent les chances de grossesse et augmentent le risque de fausses couches spontanées. En cas de don d’ovocytes, c’est avant tout l’IMC de la receveuse qui importerait, l’impact sur les chances de grossesse étant lié à un trouble de l’implantation plutôt qu’à la qualité ovocytaire.
À noter que dans le syndrome des ovaires polykystiques (SPOK), l’adiposité abdominale et l’insulinorésistance sont fréquentes et seraient à l’origine de l’anovulation observée dans cette pathologie, considérée comme métabolique. Une perte de poids de 5 à 10% permet d’améliorer les chances de grossesse.
Hypofertilité du couple : le poids du père
Le poids influence également la fertilité de l’homme et du couple, précise le Pr Rachel Lévy**. L’allongement du délai à concevoir augmente avec l’IMC du père, notamment à partir d’un IMC > 35 kg/m2, et les chances de grossesse diminuent dans le cadre d’une fécondation in vitro du fait d’un taux diminué de blastulation. Par ailleurs, plus l’IMC du père est élevé, plus le risque d’oligozoospermie, d’azoospermie et d’ADN spermatique fragmenté est élevé. L’obésité abdominale tend également à réduire le nombre de spermatozoïdes et leur mobilité. Le concept de « l’origine développementale de la santé et des maladies » (DOHaD) prend ici tout son sens. À chaque période du développement – gamétogenèse, fécondation, développement embryonnaire – correspond une susceptibilité spécifique aux facteurs environnementaux. Les mécanismes sont complexes et sans doute multifactoriels. C’est ainsi que s’expliquerait la transmission transgénérationnelle d’un phénotype métabolique via des marques épigénétiques héritables portées par les spermatozoïdes. L’impact de l’obésité paternelle induite par l’alimentation sur la santé métabolique et reproductive de deux générations a été montré chez la souris.
La nutrition affecte aussi la reproduction
On sait que les enfants (et même les petits-enfants) issus de mères soumises à la famine ont un risque de surpoids et de maladies cardiovasculaires plus élevé ; l’environnement maternel durant la grossesse peut donc affecter la fertilité de l’enfant à venir quel que soit son sexe, rappelle Pascale Chavatte-Palmer***. Chez l’animal, la sous-nutrition maternelle affecte la réponse hypophysaire à la GnRH et le développement des gonades, et l’excès nutritionnel est aussi associé à un retard de croissance in utero (RCIU) affectant les fonctions ovarienne et testiculaire. Chez l’homme, le RCIU peut être associé dans les deux sexes à une altération du développement gonadique dès le stade fœtal ou au moment de la naissance et à des perturbations du bilan hormonal à la puberté avec un risque d’hypofertilité ultérieur. Par ailleurs, des liens sont retrouvés entre IMC élevé de la mère avant conception et puberté précoce chez les filles, altération des paramètres spermatiques chez les garçons à l’âge adulte…
En conclusion, le poids mais aussi l’état nutritionnel de l’homme et de la femme doivent être plus largement pris en compte dans les diagnostics d’infertilité et l’accompagnement des futurs parents dans leur désir d’enfant.
Pour aller plus loin :
* Médecine de la reproduction, hôpital Jean-Verdier, Bondy.
** Biologie de la reproduction, hôpital Jean-Verdier, Bondy, hôpital Tenon, Paris.
*** INRA, UMR Biologie du développement et reproduction
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